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(mai 2004)

Parité professionnelle
A chaque entreprise sa stratégie "femmes"

Les entreprises françaises tentent de féminiser pas à pas leur effectif. Toutes n'adoptent pas la même politique, le volontarisme restant une valeur rare.
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"Les entreprises ayant le plus fort taux de femmes dirigeantes ont de meilleures performances financières que celles qui comptent proportionnellement moins de femmes dans leurs instances dirigeantes." Telle est la conclusion d'une étude menée par le cabinet Catalyst auprès de 353 sociétés répertoriées parmi les 500 plus importantes du monde. Une conclusion qui devrait intéresser directement les actionnaires.

Face au papy-boom et à la pénurie annoncée de cadres, les entreprises ne pourront bientôt plus faire l'impasse sur la moitié de la population active. Conscientes de ces enjeux, les directions des ressources humaines mettent en place des programmes pour promouvoir la parité professionnelle. En France, IBM, France Télécom, Schlumberger, PPR ou encore l'Agence spatiale européenne se sont lancer dans la danse.

"Beaucoup d'entreprises françaises ont aujourd'hui la volonté d'avancer sur ce terrain, mais cela reste un sujet très politique" observe Ingrid Lieutaud, qui vient de créer DS manager, un cabinet de conseil en ressources humaines et diversité. Une sensiblisation qui avance pas à pas alors que de l'autre côté de l'Atlantique, aux Etats-Unis, le sujet est déjà dépassé. Les entreprises y mènent des actions depuis dix ans, plus largement en faveur des minorities. Les méthodes employées se sont souvent révélées très volontaristes, s'appuyant notamment sur la discrimination positive.

Du coup, les multinationales présentes aux Etats-Unis deviennent les nouveaux vecteurs de la parité "made in US", notamment en France. C'est le cas du groupe Schlumberger, qui suit un programme de diversité ambitieux dans le monde entier. Alors que la plupart des métiers du groupe sont traditionnellement masculins, 30 % des postes clefs de l'entreprise devront être occupés par des femmes d'ici 2010, contre 13 % aujourd'hui. Pour respecter cet objectif, les responsables des ressources humaines sont intéressés sur ces résultats.

S'attaquer au problème de manière diplomate"

Ashley Clark, PPR

Mais les objectifs chiffrés, qui reviennent finalement à établir des quotas, ne sont pas vus d'un bon oeil en France. "Il ne faut surtout pas traiter cette problématique sur le thème des minorities, comme aux Etats-Unis, prévient Ingrid Lieutaud. Cela ne correspond pas à notre culture." Un point de vue partagé par Ashley Clark, directrice du développement des ressources humaines du groupe PPR. "En Europe, il faut s'attaquer au problème de manière plus diplomate, considère cette Américaine. Chez PPR, nous ne conduisons pas de politique définie, mais nous suivons de très près certains indicateurs."

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  Le rapport de Catalyst

48 % des 100 000 collaborateurs de PPR sont aujourd'hui des femmes, 2003 étant une année à marquer d'un pierre blanche pour le groupe : pour la première fois, autant de femmes que d'hommes ont été promus managers. Malgré ce signe tangible, la proportion de femmes managers (37 %) n'a augmenté que de 1,4 % en deux ans. Et dans le "leadership group", les 185 hauts dirigeants du groupe, la proportion de femmes n'est que de 11 %. " Dans un souci de diversité, nous cherchons à augmenter ces proportions, au même titre que pour les collaborateurs internationaux par exemple, affirme Ashley Clark. Mais nous ne souhaitons pas fixer d'objectifs. Cela pourrait être mal perçu !"

Cette position "diplomatique" est adoptée par la plupart des groupes français. Plutôt que d'imposer des objectifs sur la parité, les entreprises préférent accumuler différentes initiatives et créer un climat favorable, souvent sous l'impulsion de la direction générale. Chez France Télécom, les critères de choix des hauts potentiels ont ainsi été repensés en douceur. L'opérateur est parti d'un constat, simple : la carrière des femmes est essentiellement ralentie du fait des maternités. Plutôt que de détecter les forts potentiels féminins à 30 ou 35 ans, France Télécom a décidé d'attendre les 40 ans.

L'obligation de passer par un poste à mobilité internationale pour faire partie des hauts potentiels, souvent rédhibitoire pour les mères de famille, a été remplacée par l'obligation d'avoir occupé un "poste à dimension internationale". Et pour sensibiliser les managers de demain, l'opérateur a mis en place des programmes de "mentoring" destinés aux jeunes cadres et animés par des hommes et des femmes.

Un discours rodé, sans réflexion de fond"

Ingrid Lieutaud, DS Manager

Mais toutes les entreprises ne sont pas logées à la même enseigne face au dossier de la parité. Chez Deloitte, par exemple, le recrutement des juniors respecte par nature l'équilibre hommes-femmes. "Dans l'audit, nous recrutons principalement des jeunes diplômés d'écoles de commerce, explique Hélène Ratte, DRH associée de Deloitte pour la région Europe, Moyen-Orient et Afrique. Or cette population est elle-même totalement mixte. Nous embauchons donc autant de femmes que d'hommes. Et nous gardons les femmes de plus en plus longtemps."

Un avantage dont ne peuvent bénéficier les entreprises davantage technologiques, qui recrutent des candidats issus de cursus nettement moins féminisés. L'Agence spatiale européenne (ESA) connaît bien ce problème, et notamment la "désaffection" des jeunes femmes pour les études scientifiques. Malgré une politique proactive sur la parité, l'ESA doit donc se contenter d'un féminisation de ces équipes au compte-goutte. Conclusion : entre 2001 et 2004, la part des femmes dans l'effectif total est passée de 4,4 à 5,5 %.

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Pour l'instant, aucun bilan ne saurait être tiré de ces politiques, qu'elles soient volontaristes ou diplomates. La parité avance en France par tâtonnements. "La seule chose d'ores et déjà notable, analyse Ingrid Lieutaud, fondatrice de DS Manager, c'est que certaines entreprises savent très bien communiquer sur le sujet. Mais elles ont souvent un discours rodé sans mener aucune réflexion de fond." Pourtant, à pas de géant ou de velours, il faudra bien avancer.


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