26/01/2005
Le
cas Buffalo Grill Communication de crise
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Retour
sur une crise qui a fait baisser, en quelques heures, la fréquentation
des restaurants Buffalo Grill de 40 %. |
Fin 2002, suite aux affirmations d'un ancien salarié face
aux gendarmes, Buffalo Grill est soupçonné d'avoir
importé de la viande britannique après l'embargo de
1996 lié à la vache folle. Le 19 décembre,
juge d'instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy, qui enquête
sur le décès en 2000 de deux victimes de la maladie
de Creutzfeldt-Jakob, met alors en examen Christian Picart, fondateur
du groupe, et Daniel Batailler, directeur des achats, pour "homicides
involontaires". D'après un communiqué du 3 janvier
2002, la fréquentation des restaurants a baissé de
40 % dès le début de la crise. Analyse des faits
marquants de l'affaire Buffalo Grill, sous l'angle de la communication
de crise.
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Le
manque de préparation |
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"La direction de Buffalo
Grill n'avait manifestement pas imaginé qu'un tel risque
puisse toucher l'entreprise", note Michèle Gabay,
professeur en sciences de l'information et de la communication
à l'université Paris VII et à HEC. Dès
l'explosion médiatique de l'affaire, le PDG, Christian
Picart, ne peut s'exprimer puisqu'il est mis en examen. Son
avocat, maître Jean-Pierre Versini-Campinchi, se présentera
alors comme l'un des interlocuteurs. Parallèlement,
maître Emeric Ernoult propose ses services à
François Picart, le frère du fondateur, officiellement
nommé en mai 2002 président du conseil de surveillance.
Me Ernoult mettra alors en place une cellule de crise.
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"Dans
le secteur alimentaire, lorsqu'une marque est mise en cause
sur un de ses produits, la règle d'or consiste à
s'adresser d'abord et avant tout à ses clients et d'éviter
la polémique", affirme Jean-Michel Guillery, auteur
d'un "Que sais-je ?" sur la communication de
crise et associé chez MGVM consultants. "Il faut
aussi parler d'une seule voix", insiste-t-il. Après
avoir gardé le silence 48 heures, les avocats et François
Picart commencent à s'exprimer, et à se contre-dire,
notamment au sujet de l'importation de viande britannique
avant l'embargo de 1996. D'après Le Monde (16/01/2003),
le philosophe Alain Etchegoyen, chargé d'élaborer
le discours, quitte la cellule de crise le 24 décembre.
"Je pense que l'on ne doit pas affirmer des choses que
l'on ne peut pas vérifier, comme dire que l'entreprise
n'a jamais acheté de la viande britannique", explique-t-il
au quotidien. Contacté par Le Journal du Management,
Alain Etchegoyen, aujourd'hui commissaire au Plan, a confirmé
ces conflits internes et la confusion entre les rôles
juridique et de communication.
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Des
maladresses avec les médias |
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"Les dossiers de presse n'étaient pas préparés
dans le sens d'une communication, mais dans un langage marketing
ou juridique, analyse Michèle Gabay. En outre, dans
un reportage de France 2, un salarié a répondu
au journaliste avec un discours tout fait, légèrement
à côté de la question. Et la direction
a refusé qu'un autre salarié soit interviewé
dans le même reportage." Dans la foulée,
Buffalo Grill porte plainte contre X à la suite de propos
prononcés aux journaux télévisés de France 3 diffusés le 19
décembre 2002 à 19h30 et 23h00. Le Parisien sera également
vigoureusement mis en cause par François Picart sur
l'antenne de Europe 1. L'intervention dans les médias
de Renaud Dutreil, alors secrétaire d'Etat au commerce et
aux PME, alimente les tensions au sein de la cellule de crise
et perturbe le discours.
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La
mise en uvre d'une stratégie |
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Le 27 décembre, la direction soutient la manifestation
des salariés de Buffalo Grill. Le même jour,
l'agence Image Force entre en scène. François
Picart devient alors l'unique interlocuteur des
médias. L'agence de communication réalise un
site Internet qui sera en ligne dès le lendemain. Ce
site a notamment permis de contrer une révélation
du Canard enchaîné avant sa parution.
Le journal s'apprête à publier une phrase extraite
d'un e-mail reçu par un salarié en septembre
2001 : "C'est un stock de pavés fait pendant la
vache folle, il faut le passer absolument". Sur le site
de Buffalo Grill, Image Force met en ligne l'intégralité
du mail pour montrer que la phares a été sortie
de son contexte (Journal
du Net, 15/01/2003).
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Une
communication active |
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A partir du 10 janvier, Buffalo Grill reprend l'initiative
en lançant une grande campagne de publicité
dans la presse "L'épreuve rend plus fort".
Une autre campagne est lancée sur affiche ("Les
grillades de qualité, c'est notre métier") ainsi qu'une
campagne de communication dans les restaurants. "Cela
reste peu orienté vers les consommateurs", note
cependant Jean-Michel Guillery.
Au cours du mois de janvier 2003, divers papiers relativement
positifs paraissent sur les moyens employés par Buffalo
Grill pour sa communication de crise. Mais la crise est encore
loin d'être finie. Buffalo Grill va connaître
dans les mois qui suivent d'autres difficultés, notamment
avec la demande de dédommagements de certains franchisés,
l'incendie de restaurants ou, plus récemment, la saisie
de 60 kilos de viande avariée.
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